Fruits et légumes : cocktail de
pesticides
Sans devenir parano, mieux vaut
connaître les dangers de notre alimentation pour éviter de
s’empoisonner à petit feu… Nos astuces pour déjouer les pièges
de la malbouffe.
Championne, la France ! Avec près
de 80 000 tonnes de pesticides déversés sur les cultures chaque
année, elle est le premier utilisateur européen de ces substances.
Pas étonnant donc qu’on en retrouve des traces dans nos assiettes.
En 2009, selon l’association
Générations futures, 52,1 % de nos fruits et légumes contenaient
des résidus de pesticides, contre 45 % en 2006. Rien d’illégal,
sauf que 7,6 % dépassaient les limites maximales autorisées, 8,2 %
pour les céréales. Parmi les hors-la-loi, les pêches, les fraises,
les oranges, les citrons, les mandarines, les poivrons, le céleri
branche, les épinards, les poireaux, les tomates, les laitues… En
2008, ce sont 4,5 % des raisins de 5 pays européens qui n’étaient
pas dans les clous.
On ne s’inquiéterait pas si certains
de ces pesticides n’étaient pas classés cancérigènes, mutagènes
et toxiques pour la reproduction et si nous n’étions exposés qu’à
un seul. Mais il y en a en moyenne 5 par fruit. Une pomme peut même
recevoir jusqu’à 27 traitements différents, un raisin, 40, de
même qu’une pomme de terre !
Le réseau Pan-Europe, qui regroupe 600
Ong, propose de réduire la quantité de pesticides de moitié. Un
rêve ! En 2008, dans le cadre de l’harmonisation de la
réglementation au niveau européen, plutôt que d’opter pour un
alignement sur les doses les plus faibles en vigueur dans certains
pays, la Commission européenne a choisi les plus hautes. Moralité :
une tomate française peut désormais recevoir 10 fois plus
d’herbicide qu’avant. A raison de 5 fruits et légumes
recommandés par jour, merci les lobbys.
Astuce :
Laver et éplucher ne suffit pas, car
les pesticides peuvent imprégner la chair. Privilégiez les fruits
et légumes bio, qui, selon l’Afssa, « éliminent les risques
associés aux produits phytosanitaires de synthèse pour la santé
humaine ».
Achetez des produits de saison et de
proximité, car, pour qu’ils se conservent longtemps, ceux qui
viennent de loin sont aspergés de pesticides après la récolte.
« Les consommateurs manquent
d’information »
Dr Laurent Chevallier, nutritionniste
et membre du Réseau Environnement Santé.
Qui contrôle nos assiettes ?
C’est la Direction générale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
(Dgccrf) qui est chargée de vérifier l’application de la
réglementation concernant l’alimentation. Le problème, c’est
que les moyens dont elle dispose sont nettement insuffisants, pour ne
pas dire inexistants, et que, même si elle fait bien son travail, il
y a des informations que le consommateur n’a pas. On ne sait pas,
par exemple, ce que recouvre exactement l’appellation « extraits
végétaux » dans le Coca.
Pour informer mes patients allergiques,
j’ai interrogé l’Agence française de sécurité sanitaire des
aliments (Afssa), qui a été incapable de m’éclairer.
Les agences sanitaires jouent-elles
bien leur rôle ?
Elles ne sont pas très réactives. Fin
2010, quand j’ai appris par une étude danoise que les femmes qui
buvaient au moins une boisson gazeuse « light » par jour
avaient plus de risques d’accoucher prématurément, je pensais que
l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation
(Anses) allait revoir les recommandations sur l’aspartame, au moins
pour protéger les futures mamans et leurs bébés. Et rien.
La réaction de l’Agence européenne
de sécurité sanitaire des aliments (Efsa) de ne pas modifier la
dose journalière admissible est tout aussi incroyable alors que les
études ayant servi à la fixer n’ont jamais été publiées dans
une revue scientifique comme c’est la règle. Le Réseau
environnement santé vient néanmoins d’obtenir que la Commission
européenne fasse une réévaluation en septembre.
A quoi attribuez-vous ces
dysfonctionnements ?
C’est surtout le mode de
fonctionnement des agences qui ne va pas, les habitudes culturelles
qui font qu’on attend, qu’on minimise les études inquiétantes,
qu’on demande toujours plus de preuves, qu’on discrédite les
lanceurs d’alerte…
Du coup, les gens sont perdus. Cette
cacophonie arrange bien les industriels. Leur dernière trouvaille
publicitaire ? Le neuromarketing, une technique qui consiste à
faire passer une Irm à des consommateurs cobayes pour voir les
réactions de leur cerveau face à un produit.
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