De nombreux médicaments sont plus
dangereux qu’utiles, selon la revue Prescrire
Nathanaël MERGUI/FNMF
« Nous ne sommes pas contents car
notre souci est que les gens soient mieux soignés », a déclaré
Bruno Toussaint, directeur de la revue indépendante Prescrire, hier,
en préalable de la remise de sa Pilule d’Or du médicament 2013.
Ce prix, organisé tous les ans, sert à
distinguer les firmes pharmaceutiques ayant commercialisé des
médicaments « permettant de faire progresser un domaine de la
thérapeutique de manière tangible
au bénéfice des patients ».
Or, cette année, aucune Pilule d’Or
n’a pu être décernée. C’était déjà le cas l’an passé. «
Nous sommes en panne d’innovation », déplore Bruno Toussaint.
Pire : il y aurait plutôt des médicaments à
supprimer.
« Mediator, les pilules de 3ème et
4ème générations ne sont que quelques arbres qui cachent la forêt,
précise-t-il. Chaque année, des médicaments sont autorisés sans
progrès notoires pour les patients.
Parfois, ils sont moins efficaces ou
plus nocifs qu’un ancien médicament de référence ».
Une nouveauté sur cinq est à éviter
Selon la Revue, qui consacre un dossier
à ce sujet dans son numéro de février, en 2012, « la moitié des
nouveaux médicaments ou des nouvelles indications n’apportent pas
de progrès », seuls 4
représentent une réelle avancée et,
plus alarmant, « une nouveauté sur cinq est à éviter ». Ainsi,
parmi les nouvelles molécules analysées par Prescrire, environ 18%
comportent un bénéfice-risque
défavorable et n’auraient pas du
être autorisées.
Comment en est-on arrivé là ? La
revue le résume dans ses colonnes : « Une promotion massive leur
assure une image positive aux yeux des soignants et des patients. Des
leaders d’opinion renommés
13:17 2013-02-22 interviennent dans les
congrès et les médias spécialisés. Des campagnes de presse
mettent en avant le problème de santé visé par le médicament, ce
qui pousse les patients concernés à le demander, etc. ».
Résultat : de nombreux médicaments
sont plus dangereux qu’utiles. « Les agences sanitaires ne font
pas leur travail de protection des patients », dénonce Bruno
Toussaint, qui rappelle que depuis 2010, année où a éclaté le
scandale du Médiator, « des dizaines de médicaments auraient du
être retirés du marché ».
Environ 60 médicaments à écarter
Des nouveaux mais aussi des anciens qui
comportent plus de risques que d’avantages. Une soixantaine, au
total, dont la liste est publiée sur le site de Prescrire
www.prescrire.fr parmi lesquels on trouve 15 médicaments contre la
douleur, les rhumatismes (Nexen, Ketum...), l’ostéoporose et
l’arthrose, 10 antidépresseurs (Stablon, Eflexor, Stresam...) dont
deux utilisés dans le sevrage tabagique (Champix et Zyban), 9
médicaments pour le coeur (Rasilez, un antihypertenseur, Lipanor, un
hypochlolestérolémiant...), 5 anticancéreux (Yondelis,
Removab...), 3 médicaments utilisés en dermatologie et allergologie
(Protoptic contre l’eczéma...), 4 antidiabètiques (Onglyza,
Januvia...) auxquels s’ajoute le Xenical contre la perte de poids,
2 médicaments de gastro-entérologie (Motilium, Resolor), 2
antibiotiques (Ketek...), un traitement hormonal substitutif de la
ménopause (Livial), etc.
Pour Prescrire, « Les patients et
soignants ont intérêt à réviser les traitements en cours et à
leur préférer les traitements éprouvés. Sans attendre que les
autorités décident enfin les retraits du marché qui s’impose au
vu des données d’évaluation ».
De fait, en dépit des alertes répétées
depuis 1997, il aura fallu attendre 2009 pour que l’Agence
nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
(Afssaps), devenue Agence Nationale de sécurité du Médicament
(Ansm), interdise le Mediator. Pendant ce temps, combien de victimes
?
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